lundi 27 août 2007

Le saviez-vous - La Gazette Web

Quelles sont les sources utilisées pour écrire la vie d’un inconnu de l’histoire ? par Alain Denizet
Arrière-grand-père de mon grand-père, Aubin Denizet (1798-1854) était le premier ancêtre sur lequel les mémoires étaient muettes. Malgré la filiation qui me rattache à lui, il était un étranger, l’un de ces oubliés de l’histoire que chacun de nous peut compter dans l’arbre de sa parentèle. C’est pourquoi j’ai voulu connaître le monde d’Aubin en croisant généalogie et histoire. Quelles furent mes sources et quel fut le résultat de cette enquête ?
Grâce aux registres paroissiaux et à ceux de l’état-civil, j’ai reconstitué sa généalogie en notant les noms des parrains, des marraines et ceux des témoins aux inhumations et aux mariages. Une carte des affinités a dès lors pris forme, complétée par celle des relations de voisinage rendue possible par l’exploitation croisée du cadastre et des actes notariés. La connaissance de ses familiers était la garantie de sélectionner par la suite les affaires qu’il avait eu le plus de chance de connaître à leur contact, éléments essentiels à la compréhension de l’atmosphère de son village et qui nous sont connus par les archives municipales et départementales.
Dans les premières, outre les délibérations du conseil municipal et du bureau de bienfaisance, on trouve également les liasses contenant les élections, le nom des votants et des scrutateurs ; la liste des intempéries, des incendies, des enfants abandonnés, telle la petite nièce d’Aubin, mais aussi le nom des réquisitionnés - dont sa mère - pendant l’occupation prussienne de 1815, événement local qui fait le lien avec la « grande histoire ».
Aux archives départementales, les registres de notaires renseignent des domaines différents et, en premier lieu, la vie privée de nos ancêtres qui est l’aspect le plus difficile à cerner : inventaires après décès et ventes mobilières donnent des informations sur le nombre et l’aménagement des pièces, l’état et le prix du linge, des meubles, des couverts tandis que testaments, héritages, demandes de pension et contrats de mariage nous font entrer dans le jeu des relations familiales ; enfin, ventes, achats et emprunts nous mènent au cœur des stratégies sociales et donnent souvent de précieuses données généalogiques.
La série U consacrée à la justice est extrêmement riche pour appréhender la vie quotidienne. On y rencontre Aubin témoin dans une affaire de ratirage, son voisin qui bat sa femme ou encore le marchand de chevaux du village appelé à témoigner aux assises contre son courtier indélicat. La série R nous apprend qu’Aubin a échappé à la conscription, mais que son frère « bon pour le service » fut réformé à cause sa petite taille (1,45 m) : cette série est la seule (avec les passeports intérieurs et les archives judiciaires) à donner un signalement physique.
Ces fonds communaux et départementaux ont été complétés par des recherches ciblées aux archives nationales et à celles du diocèse de Chartres, par la lecture exhaustive du journal « Le Glaneur » de 1835 à 1851 et par les fonds privés de la famille de Cambray.
Ainsi, les 150 signatures d’Aubin, le nombre égal de fois où son nom est mentionné (cadastre, recensement, listes électorales, conseil municipal), la recherche systématique des mêmes indices laissés par sa famille, ses connaissances et la quête des évènements qui ont marqué le village et ses environs permettent de dresser le portrait d’un laboureur, homme discret, conservateur, petit notable et d’être avec lui dans son monde, le temps d’un livre. Comme s’il faisait désormais partie de la famille.

1 commentaire:

Alain Denizet a dit…

Je ne peux que saluer ces initiatives qui vont à la recherche de l'histoire de leurs ancêtres en utilisant l'immense ressource des archives. N'oubliez pas les archives de la commune : même abandonnées dans le grenier de la mairie, elles ont beaucoup à dire !

je me permets trois informations :

- Mon livre "Au coeur de lavBeauce, enquête sur un paysan sans histoire " n'étant distribué que dans la Région Centre, vous pouvez le demander à votre libraire ou me le commander directement. Il sera expédié dès réception d'un chèque de 25,5 euros ( 24 + 1,5 euro de port). Si le lecteur le souhaite, je peux le dédicacer.
- j'assure des conférences autour de mon livre.
- La revue Généalogie-Magazine consacrera dans un futur n° ( novembre en principe)un dossier sur la méthode utilisée pour faire revivre un ancêtre "sans histoire".

Pour tout contact :
Alain Denizet
1 rue de l'enfer
Muzy 27650
alain.denizet@wanadoo.fr